dans ,

L’analyse du Boss : Grand Prix de France MotoGP 2025

Johann Zarco a surfé sur le chaos pluvieux du Mans pour décrocher une victoire immensément populaire, tandis que Marc Márquez assurait des points cruciaux pour le championnat.

On dit que gagner son Grand Prix national, c’est comme marquer le but de la victoire en finale de Coupe du monde. Mais une seule personne sur cette planète sait ce que cela fait de gagner son Grand Prix MotoGP à domicile, au Mans.

Et il n’y a pas de meilleur endroit pour le faire qu’au Mans, grâce à l’immense foule bruyante qui envahit les vastes tribunes, construites pour accueillir le public des 24 Heures auto du circuit.

Dimanche, les 111 000 fans avaient des airs de meilleur public de football – entonnant des chants pour Johann Zarco et reprenant la Marseillaise encore et encore.

Zarco, une victoire qui vient de loin

Zarco fréquente le paddock MotoGP depuis près de deux décennies, depuis sa victoire dans la toute première Red Bull Rookies Cup en 2007. Au début de sa carrière en Grands Prix, il n’était pas très bavard et semblait se méfier des journalistes (non sans raison). Plus récemment, il a laissé de côté cette posture distante pour devenir une sorte de roi philosophe du championnat, son Éric Cantona, toujours prêt à sortir une citation décalée.

Mais pas ce dimanche. À juste titre, le pilote de 34 ans était submergé par l’ampleur de son exploit – la lèvre tremblante, retenant ses larmes alors qu’il exécutait son backflip traditionnel devant les tribunes surplombant la ligne droite des stands.

« Je m’attendais à plus de larmes – elles sont là mais ne sortent pas ! » a-t-il souri. « C’est très spécial – je n’arrive pas à croire que c’est arrivé. Je cours pour gagner des courses, pour être sur le podium. Je me pousse toujours à donner le meilleur de moi-même et j’ai toujours cru qu’un jour je pourrais gagner. »

Devant son public et ses parents

Zarco a peut-être retenu ses larmes, mais pas ses parents. De façon étonnante, c’était la première fois que sa mère assistait à un Grand Prix. Zarco ne lui avait demandé de venir que parce qu’il voulait qu’elle entende les fans français chanter à pleins poumons. Personne, pas même la famille Zarco, ne savait qu’il y aurait une si bonne raison pour qu’ils chantent plus fort que jamais.

« C’est un peu étrange à cause de la façon dont c’est arrivé aujourd’hui, » a-t-il poursuivi. « J’ai dû beaucoup contrôler et attendre que la victoire vienne. Je suis tellement heureux parce que j’aime l’histoire de la moto, donc écrire cette ligne – être un vainqueur français du GP de France ! – waouh, c’est très spécial et je suis très heureux. »

Un seul autre Français avait réalisé ce que Zarco a accompli samedi – en 1954, Pierre Monneret, pilote officiel Gilera, avait remporté le GP de France 500cc sur le circuit urbain de Reims, à 150 km au nord-est de Paris.

Zarco n’avait pas seulement le public français derrière lui, il avait aussi la météo mancelle de son côté. Honda a peut-être fait des progrès notables avec sa RC213V ces derniers mois, mais la moto n’est pas encore prête pour gagner sur le sec.

Zarco, chante sous la pluie…

La pluie était exactement ce dont Zarco et sa RC213V avaient besoin. Et peut-être que son âge – il est le pilote le plus âgé de la grille – l’a aidé à traverser le chaos des préparatifs et des premiers tours : le premier départ annulé après que toute la grille a terminé le tour de chauffe dans la voie des stands pour passer aux motos de pluie, puis le second départ après un autre changement de moto, vers des machines équipées de pneus slicks.

Zarco a été l’un des rares à ne pas changer d’avis durant le deuxième tour de formation. L’application météo de Lucio Cecchinello, patron de l’équipe LCR Honda, lui annonçait avec certitude l’arrivée imminente d’une nouvelle averse. Donc, même si les slicks semblaient le bon choix à ce moment-là, ce n’était pas le cas. C’est ce qui a permis à Zarco de rester fidèle à son intuition et de conserver ses pneus pluie, alors que beaucoup faisaient le choix inverse.

Zarco gagne Le Mans

Mais tout aurait pu s’arrêter quelques secondes après le départ, lorsqu’Enea Bastianini s’est jeté à l’intérieur au virage 3 comme un forcené, percutant Pecco Bagnaia.

Joan Mir a à peine évité le désastre italien, mais ce faisant, il a percuté Zarco si violemment que ce dernier a perdu la main gauche du guidon, l’impact détruisant aussi ses commandes. Mir a lourdement chuté et s’est fracturé la main droite.

Quand Zarco est sorti du bac à graviers du virage 3, il était quasiment dernier. Beaucoup auraient alors pensé que leur course était terminée. Pas Zarco. C’était son 288e départ en GP, et il sait garder la tête froide quand tout le monde perd la sienne : rester calme, ne pas précipiter les choses, laisser venir la course.

« À partir de là, c’était : OK, ne grille pas tes pneus pluie, prends ce que tu peux prendre, tu verras – et j’ai vu. »

Les premiers tours étaient vertigineux. Tous les pilotes ayant repassé leur moto slick ont dû effectuer deux pénalités de long lap, conformément aux nouvelles règles mises en place après le cafouillage de la grille à Austin.

Marquez domine

Puis, une nouvelle averse. Marc Márquez menait, poursuivi par Fabio Quartararo (parti en pole) et Brad Binder, tous en slicks. En abordant le dernier virage au 4e tour, Márquez a failli chuter, tandis que Quartararo et Binder se sont réellement vautrés dans les graviers. Le virage 14 est toujours glissant sous la pluie car son asphalte est poli par les fond plats des voitures lors des 24 Heures.

Ces chutes ont provoqué un nouveau changement massif de motos dans les tours suivants, propulsant Zarco en tête au 8e tour, encore 18 à parcourir. Il a passé chacun de ces tours à flirter avec la chute, car la piste n’était jamais totalement mouillée, donc très grasse – une situation où il est difficile de trouver la limite sans la dépasser.

L’ancien champion du monde Moto2 devait gérer deux menaces : ne pas chuter, et aller assez vite pour garder Marc Márquez derrière. Il a donc passé la prochaine demi-heure sur un fil. Márquez a tenté de combler les 8 secondes d’écart mais a vite compris que pousser plus serait trop risqué, avec encore en mémoire sa chute à Jerez.

« Sans l’erreur à Jerez, je suis sûr à 80 % que j’aurais chuté aujourd’hui, car je me connais ! »
a plaisanté l’Espagnol.

Une fois Márquez résigné à la 2e place, et après les deux chutes de son frère Alex, Zarco était en sécurité – tant qu’il gardait une concentration absolue et ne se laissait pas tromper par son avance. Ralentir, c’est refroidir les pneus et risquer la chute.

« C’était une course difficile, » a confié Zarco après sa deuxième victoire en MotoGP, 19 mois après la première, avec Pramac Ducati à Phillip Island. « On savait qu’il allait pleuvoir, donc j’ai choisi les pneus pluie. Quand la course a commencé, ceux en slicks étaient plus rapides, mais il y avait quelques gouttes, donc je savais que c’était trop risqué. Puis je les ai vus chuter et rentrer au stand, donc j’ai gagné des positions. Jack (Miller) était aussi en pneus pluie et je sais qu’il est très fort dans ces conditions, mais quand il est tombé, j’ai commencé à croire que je pouvais faire quelque chose de bien. »

La victoire de Zarco est la première pour Honda depuis celle d’Alex Rins au GP des Amériques 2023, et elle est d’autant plus précieuse qu’elle met fin à la série de victoires de Ducati. Deux semaines plus tôt à Jerez, Álex Márquez avait offert à Ducati sa 22e victoire consécutive, égalant le record de Honda des années 1990. Tout le monde pensait que Ducati allait battre ce record dimanche, mais grâce à Zarco et à la pluie, ce ne fut pas le cas.

Les autres faits marquants

  • Marc Márquez termine deuxième – sa première arrivée en GP cette saison sans victoire – un résultat essentiel. Il avait remporté le sprint la veille (son sixième consécutif) pour reprendre la tête du championnat à son frère. Grâce à la chute d’Álex dimanche, Marc partira à Silverstone avec 22 points d’avance.
  • Pecco Bagnaia, en difficulté ce week-end, a chuté lors du sprint puis a été éliminé dès le début de la course dominicale par Bastianini. Pourtant, il avait chaussé les bons pneus pour la pluie. Il a repris la course pour finir 16e, hors des points.
  • Fermín Aldeguer, impressionnant une fois de plus, a signé un nouveau podium après celui du sprint : 3e place en course, malgré une transition tardive vers les pneus pluie qui l’a fait rétrograder de la 1ère à la 7e position. Il a ensuite dépassé Maverick Viñales et Pedro Acosta dans les derniers tours, signant les meilleurs chronos en piste.
  • La performance des deux pilotes Gresini, comparée aux difficultés de Bagnaia et Di Giannantonio, confirme que la GP24 est actuellement la meilleure moto du plateau.
  • Takaaki Nakagami, en wild card, termine 6e : son meilleur résultat depuis 2021, lui qui a quitté son poste de titulaire l’an dernier.

Par Mat Oxley – Le Boss

On marque des points ?

10 Points
Upvote Downvote
Team SB

Rédigé par Team SB

Zarco gagne Le Mans

Victoire historique de Johann Zarco au Grand Prix de France MotoGP 2025 : notre héros tricolore triomphe sous la pluie

Toprak Razgatlioglu vainqueur à Most, Lucas Mahias troisième en Supersport